lundi 11 février 2013

Into the Wild!

On m'avait dit que le trek de six à sept jours du El Cocuy est le meilleur trek de Colombie, et également l'un des meilleurs treks d'Amérique du Sud. Le goût de l'aventure m'appelle donc à nouveau, et je décide de me rendre au petit village de El Cocuy pour préparer et faire ce trek. Par contre, je ne me doutais pas que j'étais sur le point d'entreprendre le plus beau trek que j'ai fait de ma vie...

El Cocuy est un petit village colonial paisible et éloigné de tout, où le temps semble couler à son propre rythme; c'est à dire pas très rapidement. Très traditionnel, les hommes s'y promènent tous en portant leur poncho gris, leur chapeau gris, ainsi que leur moustache, ce qui donne un aspect très paysible à la ville.


Puisque j'étais plutôt limité en temps, je décide de faire ce trek en cinq jours, puisque je sais très bien que mon corps me permet de m'acclimater très rapidement aux hautes altitudes de ce trek, avoisinant les 4 400 mètres en moyenne (il est normalement recommendé de s'acclimater un jour ou deux à l'altitude). Par contre, en une seule journée, il me faudra trouver une tente (la seule chose nécessaire pour faire du trekking qu'on n'a pas emporté dans nos bagages), une bouteille de combustible pour mon réchaud (j'ai perdu la mienne en Équateur), un partenaire de trek, une bonne carte des environs, et une boussole ou un bon guide selon le choix. Trouver des bons articles de plein-air est très difficile en Colombie, et je redoute pouvoir trouver la bouteille de combustible. Par contre, à ma grande surprise, tout juste arrivé à mon hôtel il y a Rafael, un guide de haute montagne très professionnel (il est l'un des rares Colombiens à avoir fait l'ascension de l'Everest), qui possède une agence de location d'équipement. Il possède la bouteille dont j'ai besoin et me permet de louer une tente alpine! Après avoir fait la recherche de tous les hôtels de la ville, c'est à dire environ cinq, pour me trouver un partenaire, je tombe finalement sur Kim, un Belge qui vient d'arriver dans le village et qui veut faire ce trek également. On décide finalement de prendre un guide, puisque le risque de brouillard dans les montages est plutôt élevé, que le chemin n'est pas très clair pendant une bonne partie du trajet et que je suis très limité en temps (donc ce n'est pas le temps de se perdre et de perdre une journée de marche). Après avoir acheté la toute la nourriture, on est fin prêts à partir le lendemain!

L'ascension vers le début du trek se fait à l'aide du lechero, un camion quitte El Cocuy à 6h et qui passe dans les villages en altitude situés entre El Cocuy et son village rival: Guïcan. Il sert à récolter le lait des paysans ainsi qu'à transporter des gens et autres matériels requis cette journée là. On a de la chance, un canal d'écoulement d'eau est brisé près du début du sentier; le lechero doit donc emporter les gens et matériaux servant à le réparer, ce qui nous permet d'économiser 40 minutes de marche supplémentaire ce matin là!

Dans le lechero, transportant nos sacs, des gens et un peu de tout...
C'est bien, puisque la première journée de trek s'avère comme l'une des plus difficile du parcours. Nous marchons avec nos six jours de nourriture (un jour d'extra, au cas où), devrons traverser deux cols et marcher pendant environ sept à huit heures pour nous rendre à notre premier campement, prévu sur le bord de la Laguna de la Plaza.


Malheureusement, le temps ne se fait pas très bon en cette saison normalement très sèche (février est normalement le temps le plus sec et clair de l'année pour faire ce trek): le brouillard rôde dans les environs depuis notre réveil et ne semble pas trop vouloir s'estomper... Par contre, on marche dans une très belle végétation qui à priori, semblerait plus appartenir aux fonds sous-marins qu'aux hautes montagnes.



La première partie de la marche se fera donc sous les nuages, alors qu'on parcours le río Lagunillas et ses nombreuses petites lagunes, ainsi que notre premier col: le col de Cusirí à 4 450 mètre d'altitude.


Montée vers le col. On peut apercevoir les nombreuses petites lagunes au loin.
De l'autre côté du col, l'épais brouillard nous attend, suivi d'un peu de pluie... De l'autre côté également, aucune communication possible avec le monde extérieur à moins d'avoir un téléphone GPS, puisque la communication par téléphone cellulaire ne fonctionne plus. La marche continuera donc sans qu'on ne puisse rien voir des alentours apparemment magnifiques, et dans le froid et l'inconfort de la pluie. Donc, du deuxième col, la vue normalement splendide en temps découvert nous est cachée. De plus, Kim commence sérieusement à ressentir les effets de l'altitude: maux de têtes, perte d'appétit, souffle très court et étourdissements. Le moral commence à descendre pendant cette marche exténuante avec nos 20 kg sur le dos.

Quelle vue superbe...
Avec le temps qu'il fait, on décide plutôt de faire notre campement à vingt minutes de la Laguna de la Plaza, sous une petite cave nous protégeant de la pluie pour cuisiner et dormir. On garde espoir que le lendemain matin sera dégagé (en ces haute montagnes, le matin est toujours le moment le plus découvert). Malheureusement, Kim éprouve de graves difficultés avec l'altitude pendant la nuit, et réussi à peine à dormir. Je l'entend respirer très très fort, et il doit s'asseoir de temps à autre pour pouvoir reprendre son souffle. Notre moral, déjà bien bas, se dirige tranquillement vers les talons... Heureusement, le lendemain matin, tout est complètement dégagé et nous permet finalement d'apercevoir les paysages qui nous entourent. Mais Kim est en bien mauvais état avec son gros mal de tête dû au mal des montagnes...

Notre campement, le matin de la deuxième journée
On doit donc prendre une décision: soit on continue le trek avec Kim dans cet état potentiellement dangereux, voire mortel dans des cas extrêmes, soit on revient aux cabañas qui se trouvent près des lagunes de la journée précédente en retraversant les deux cols de la veille. Continuer implique qu'il n'y a aucune communication possible avec le monde extérieur ni aucun village pendant les quatre prochains jours, tout en restant aux mêmes altitudes; retourner veut dire qu'on oublie le trek et qu'on gage sur sa sécurité. Kim, n'ayant pas de symptômes trop avancés (nausée et diarhéee par exemple), décide qu'il est prêt à continuer, même si notre prochain campement sera juché environ 200 mètres plus haut.

Les paysages se font finalement très beaux en ce début de deuxième journée alors qu'on se dirige vers la Laguna de la Plaza sous un ciel découvert, avec une végétation d'altitude qui continuera à nous impresionner. Ce qui nous remonte énormément le moral!


Nous apercevons finalement la Laguna de la Plaza après une vingtaine de minutes de marche, et là je dois dire que nous sautons de joie. Les décors environnants semblent absolument magnifiques!

Nous apercevons la lagune au loin, moi derrière notre guide avec son accoutrement rappelant celui d'un cosmonaute.
Et vraiment, elle est magnifique cette lagune! D'un côté, les hautes montagnes dont le majestueux Pan de Azúcar (pain de sucre), juchée à 5 130 mètres d'altitude. De l'autre côté, un ravin descendant 1 000 mètres plus bas qu'on surnommera la fin du monde!

La Laguna de la Plaza, avec deux Américains qu'on a rencontrés et camperont la deuxième nuit

De l'autre côté, le ravin qu'on surnomera "la fin du monde"
La marche continuera à être magnifique et complètement dégagé pendant le reste de la journée, mis à part un gros nuage qui nous obstruera la vue pendant une vingtaine de minutes.

Autre type de végétation qui semblerait plutôt devoir vivre sous l'eau...
Un nuage au loin nous obstruera la vue quelques minutes
L'eau est potable et se boit à même les rivières pendant tout le trek!
Suivra l'ascension du col de Balcones, dans les grosses roches des moraines formées par les glaciers des montagnes environnantes.


En montant la fin du col, très abrupte, je sens mon souffle court, et l'épuisement qui s'en suit me rappele vaguement l'ascension des hautes montagnes que j'ai fait dans le voyage (puisqu'on porte nos vingt kilos sur le dos), mais sur une courte durée. Par contre, j'ai peur pour Kim. Il nous suit de loin en s'arrêtant à chaque trois pas pour reprendre son souffle; il avance au rythme de l'escargot. Après une éprouvante marche, il nous rejoint sur le col et m'apprend à ce moment qu'il a une condition cardiaque: son coeur est inversée, c'est à dire que son sang fait le trajet inverse et que la partie la plus faible de son coeur exécute le plus dur labeur. Il me dit que son coeur battait à cent mille à l'heure et qu'il avait peur (le coeur qui palpite en altitude est un autre symptôme du mal des montagnes), mais là je commence sérieusement à me demander si on a pris la bonne décision en continuant le trek...

Vue de l'autre côté du col sur notre prochain campement, à la Laguna del Pañuelo
Heureusement, Kim se portera de mieux en mieux à mesure que le trek avancera et ces palpitations ne seront qu'un évènement singulier. Son défi des prochains jours sera le manque constant d'énergie causé par la perte de son appétit. En trek, c'est très important de récupérer la grande quantité de calories qu'on brûle pendant la journée.

Le site du campement est vraiment magnifique, avec sa lagune verte et son autre d'une eau pure et claire, donnant sur la vallée de la fin du monde! Vraiment, quelle magnifique journée!


Après une nuit froide à environ -10ºC, le matin frais nous gâte en nous procurant un air cristallin et figé sans aucun vent. Quel plaisir que de se réveiller sous ces géants de glaces coupé du monde et loin de toute civilisation! Ce qui remplit ma caméra de photos toutes plus belles les unes que les autres sur les environs du campement!

Moi en train de préparer du gruau, le déjeuner  par excellence du trekker
L'air est complètement figé, donnant des lagunes au reflets cristallins


La fin du monde, encore!
Les paysages de cette troisième journée seront plus beaux les uns que les autres, alors qu'on amorce le col de El Castillo (le château).

Simplement magnifique!
 Un autre col relativement difficile à franchir parmi les énormes roches, à faire les équilibristes avec nos sacs à dos, mais combien satisfaisant!

Vue du col de El Castillo sur notre ancien campement et le col de la veille au loin
Vue de l'autre côté du col sur ce qui nous attend pour le reste de la journée
Après une bonne descente, on franchira ensuite El Valle de los Cojines (la vallée des coussins), cette végétation qui ressemble à de gros coussins verts entourés d'eau. Il n'y a pas à dire, la végétation de ce trek ne cesse de nous surprendre!

Vue sur El Valle de los Cojines, où on s'arrêtera pour manger
De bonnes bottes de trekking sont nécessaire pour traverser cette vallée. Plusieurs fois il nous faudra sauter d'un coussin à l'autre, ou encore tremper nos bottes dans la boue et la vase.

Vue de l'autre côté de la vallée, alors qu'on l'a franchise
Mais bon, tout ce beau temps ne peut pas durer; alors qu'on monte dans une vallée vers notre prochain campement les nuages commencent à se lever et on commence à sentir que la brume va nous entourer à nouveau...


Nous dormirons donc à nouveau couverts par une petite caverne à un campement nommée Cueva Larga, alors que la brume se fera pesante et incessante jusqu'au lendemain matin... Ces campements sous les cavernes sont vraiment très pratiques!

La quatrième journée s'initie sous la brume, mais avec une légère découverte du ciel bleu à mesure qu'on monte vers la laguna El Avellanal. Cette journée s'annonce assez longue et l'une des plus difficiles, avec ses deux cols à franchir.

Le brouillard se dissipe
Encore une fois, cette lagune est vraiment très belle, et les environs sont à la hauteur du reste du trek!




Nous reste maintenant à franchir le col De la Sierra, le plus haut du trek avec ses 4 650 mètres d'altitude. La montée se fera sans trop de peine, même pour Kim qui finit par commencer à vaincre les maux de l'altitude!


Probablement la vue a plus majestueuse qu'on a eue de tout le trek. On est resté au col un bon trente minutes le temps d'observer la vue. Les nuages se levant nous ont cependant ramené à l'ordre...
De l'autre côté du col, les nuages se font menaçant et nous rappellent qu'on est en montagne, où le temps change très vite. Ce sera donc un reste de quatrième journée sous les nuages et éventuellement le brouillard, pour traverser notre deuxième col et finalement se rendre à notre campement à la Laguna Grande de Los Verdes sans vraiment rien y voir... Fait exceptionnel, du sable blanc nous attend sur le bord de la lagune. Nous passerons la nuit sous la pluie, et aurons la chance d'avoir encore une fois une petite caverne suffisamment grande pour pouvoir y cuisiner sans être trempés!

Il y avait en quelque sorte une petite plage de sable blanc sur le bord de la Laguna Grande de Los Verdes
Le lendemain matin est un peu moins brumeux, suffisamment éclairci pour nous laisser voir entièrement la lagune á côté de laquelle nous avons dormi.


La dernière journée est de loin la moins longue, on n'a que trois heures de marche et un seul col à franchir. Encore une fois, la chance nous sourit car les nuages se dissipent à mesure qu'on monte le col. Arrivés au point culminant, on peut finalement apercevoir la lagune de haut, celle qu'on aurait également dû apercevoir la veille à partir du précédent col, qui était alors complètement couvert.


J'éprouve un certain moment de nostalgie en me disant que je ne reverrai pas ce genre de paysages de montagnes d'ici la fin du voyage, ce qui veut dire que je devrai m'en priver pour un bout de temps...

Après ce magnifique trek, je suis finalement retourné à Villa de Leyva pour rejoindre Valérie et terminer notre voyage ensemble!

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Pendant ce temps, le récit de Valérie:

Pendant que Guillaume était en trek, j'ai enfin pu me reposer! Une vrai semaine de vacances à lire et découvrir les environs. Villa de Leyva est le village parfait pour relaxer près de la nature. J'en ai profité également pour faire du bénévolat les après-midis. Les enfants ont de l'école le matin et les services de garde n'existent pas! Ils peuvent donc venir jouer avec leurs amis, regarder des livres ou encore faire leurs devoirs sous la supervision de touristes et de Colombiens. Dès le lundi, j'ai constaté que les enfants jouent entre eux sans se soucier de ma présence! J'ai donc passé 4 jours à classer des livres de lecture, des livres à colorier et d'autres jeux, à ramasser des feuilles dans le jardin, à découdre des vieux jeans pour le projet de couture, à discuter avec d'autres touristes et à essayer de jouer au soccer (ce n'est pas ma force!).


Lors d'une ballade à quelques kilomètres du village, j'ai pu admirer plusieurs petits lacs bleus verts (pozos azules).

Lors d'une autre promenade, j'ai visité une maison construite en boue!

Samedi, j'ai quitté Villa de Leyva pour découvrir le plus grand lac de Colombie, le Lac Tota, et le paisible village de Mongui.

Playa blanca (plage de sable blanc) bordant le lac Tota à plus de 3 000 m d'altitude. Même s'il ne faisait pas chaud, quelques Colombiens se baignaient!

Église de la plaza de Armas à Mongui.

Pont construit il y a plus de 300 ans!

À ma grande surprise, le monsieur était très heureux et fier de pouvoir poser pour une touriste!

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Notre voyage se termine bientôt, on sera de retour à Montréal d'ici quatre jours.



Guillaume et Valérie

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